Une « rentrée normale », l’édito de Mr Guerra

Une « rentrée normale »

Ce sont les mots que notre ministre de l’Éducation Nationale a promis pour la rentrée scolaire en septembre.
Nous avons mis en œuvre tous nos moyens et nos énergies pour assurer dans les faits une rentrée comme tant d’autres.
Un pari réussi ?
Il est difficile de donner une réponse selon le ressenti de chaque élève, parents ou enseignants.
Pour répondre à la question, il faudrait définir, d’abord, le critère qui permet de juger une rentrée « normale ». Mais comment imaginer une rentrée « sans problème » ?
Dans le contexte actuel inédit, le virus a accéléré la sensation d’une « société liquide » (1) ; il a accentué le critère du « ressenti » face à la réalité au lieu d’essayer de comprendre les « faits ». Cela rend encore plus difficile tout discernement et met en crise notre confiance vers toute institution.
Pour sortir de cette impasse et vérifier si nous étions à la hauteur de notre « promesse », j’ai choisi d’aller sur le « terrain ». Après quelques semaines de cours, je me suis rendu dans toutes les classes du collège et du lycée, pour rencontrer les élèves et leur poser deux questions :

  • Comment avaient-ils vécu cette rentrée ?
  • Est-ce qu’ils étaient content(e)s d’être à Sainte Catherine ?

À la première question, la quasi-totalité des classes a répondu positivement. Ce qui n’a pas empêché d’exposer des problématiques spécifiques à chaque classe et pour chaque niveau.
A cette première question, une autre a suivi de la part des élèves : allons-nous être confiné(e)s à nouveau ?
Je ne me suis pas aventuré dans des prévisions fermes. Je remarque juste l’association intéressante, que les élèves eux-mêmes faisaient, entre le sentiment positif d’être retourné(e)s à l’école et le souvenir du confinement, qui suscitait une peur vis à vis de l’avenir, comme une privation de profiter d’être à l’école.
Cette question m’a permis de souligner l’importance de la responsabilité de chacun(e) dans cette rentrée. Et ainsi, par notre comportement, nous pouvons éloigner la possibilité de rester confiné(e)s dans nos maisons.
Le dialogue s’est poursuivi et s’est enrichi avec la deuxième question. Plusieurs élèves ont pris le courage d’exprimer leur ressenti, notamment les nouveaux élèves de 6ème et de 2de.
Avant la rentrée, certains élèves ont exprimé la peur de …

  • ne pas y arriver / réussir
  • ne pas s’intégrer dans la classe ou l’école
  • être jugé par leur aspect physique ou le choix de leurs vêtements
  • de se faire des ennemis

Mais après quelques jours ces peurs ont disparu pour laisser la place à un autre sentiment : l’inquiétude de l’inconnu s’est effacée et a fait paraître une découverte plus positive.
Plusieurs réponses, surtout au lycée, ont exprimé l’expérience d’une école :

  • comme une grande famille
  • avec un bon cadre de vie pour évoluer et apprendre
  • qui met à l’aise car personne ne juge
  • où se vit une unité dans la classe
  • qui ne met pas de pression
  • donne des repères rassurants
  • donne envie d’apprendre

Un autre aspect souligné a été la « bienveillance des profs », ou encore « ici on sent que l’enseignant s’intéresse aux élèves ».

Malgré les difficultés que les uns et les autres ont rencontrées pendant cette rentrée, nous ne devons pas perdre de vue, en particulier dans ce contexte de crise sanitaire et d’incertitude, que l’école est un lieu de vie vraie où il nous faut vivre la réalité comme une « nouveauté » à travers la transmission d’un savoir et d’une éducation.
Elle nous transforme en acteurs et en protagonistes de notre scolarité et donc de notre vie.
Une réflexion d’une élève de seconde m’a particulièrement frappé.
Elle disait « je suis contente d’apprendre à l’école, mais en même temps, j’ai peur de rester seule avec mes connaissances, sans arriver à les appliquer dans ma vraie vie. Parce qu’alors, une routine se met en place et je suis seule avec ce que je sais ».
En tant qu’adultes, quelle responsabilité avons-nous, dans les jours à venir !


(1) Zygmunt Bauman, sociologue

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